Atlaïs mena Cyrille dans un autre bâtiment, à la limite de la bulle protectrice. Il ouvrit une immense porte, à deux battants, sculptée dans un métal qui ressemblait fort à de l’or.
Le jeune humain découvrit alors quelque chose qui défiait son entendement : un appareil à mi-chemin entre le sous-marin et le vaisseau spatial.
- Voilà ce qui vous permettra de quitter cette île !
Cyrille le regarda, incrédule. Pourquoi le prince n’était-il pas parti s’il en avait eu les moyens pendant tout ce temps ?
- Le monde de la surface n’est plus adapté pour moi. Qu’y ferai-je ?
- Pour qu’ils fassent ce que ceux qui vous ont amené ici ont déjà fait ? Non, je ne connais que trop bien la nature humaine, malheureusement… Comment croyez-vous que ma civilisation a été détruite ? Nous étions trop vaniteux pour nous rendre compte que nous étions en train de détruire notre monde… Aujourd’hui, je suis seul ici et je préfère le rester…
Le scientifique ressentit une telle tristesse dans la confession d’Atlaïs qu’il en eut les larmes aux yeux. L’Atlante était d’une telle dignité, d’un tel courage !
Il tendit la main au prince qui la serra.
- Je compte sur vous, Cyrille, pour honorer votre promesse.
- Vous êtes certain ? Cela va…
- Je vous en supplie, faites ce que je vous demande sans vous poser de question. Cela sera mieux pour tout le monde.
Le scientifique monta dans l’engin, dont le prince lui avait brièvement expliqué le fonctionnement. Il avait également récupéré son matériel de plongée, qui lui serait utile pour respecter son engagement.
Il fit un signe de la main à Atlaïs, resté sur le quai d’embarquement. Comme il aurait aimé passer plus de temps ici et découvrir tous les secrets de cette civilisation… Malheureusement, par la cupidité de certains, cela lui était impossible.
L’appareil s’éleva doucement et prit la direction de la paroi derrière laquelle Despina et le dauphin l’attendaient.
Quand il passa au travers de la bulle, il se retourna pour s’assurer que l’eau ne pénétrait pas dans le sanctuaire. Il aperçut la silhouette du prince qui le regardait s’éloigner. Il ressentit un pincement au cœur à l’idée du sacrifice que faisait ce dernier.
La sirène et le cétacé l’accompagnèrent jusqu’à la surface. Il faisait encore nuit noir.
Cyrille accosta et descendit précipitamment. Il n’avait que très peu de temps pour faire ce qu’il avait à accomplir.
Au pas de course, et toujours en caleçon, il se rendit aux escaliers qui descendaient dans le laboratoire des monstres. Le professeur Edeline et Emma se sentaient visiblement en sécurité après l’avoir livré à Ataka car il n’y avait aucun garde.
Une fois en bas, il retrouva le dauphin devant son écran de contrôle.
- Sais ce que dois faire, annonça l’animal. Vais aider toi.
D’un hochement de tête, le scientifique le remercia et lui fit au revoir de la main. C’était sans doute la dernière fois qu’ils se voyaient, se parlaient.
Comme il l’avait promis, Cyrille mit fin aux expériences du professeur Edeline.
Il avisa l’armoire rouge réservée à l’équipement de secours et, d’un coup de coude, brisa la vitre. La douleur irradia dans tout son bras, mais il ne s’y attarda pas. Il saisit la hache et parcourut la pièce du regard. Ici, se trouvaient tout ce que ces hommes avaient volé à la civilisation des Atlantes. Il y avait sans doute des sauvegardes quelque part. Mais Cyrille savait que sans ces appareils et, surtout, sans les précieuses informations d’Atlaïs, il faudrait des mois, voire des années pour tout reconstruire.
Prenant la hache à deux mains et, la levant au-dessus de sa tête, il détruisit méthodiquement tous les ordinateurs. Le feu naquit rapidement.
Avant de quitter le laboratoire, le jeune homme se posta devant la vitre du dauphin. L’animal se tenait derrière, accompagné de Despina et d’Ataka. Cyrille distinguait d’autres silhouettes étranges derrière eux, sans parvenir à les identifier. Sans doute d’autres expériences du Professeur Edeline…
- Pars. Nous occuper du reste, dit le cétacé.
La sirène acquiesça. Néanmoins, avant de sortir du souterrain, le jeune homme fit le tour de la grande pièce en courant. A chaque aquarium, il s’arrêtait, donnait un coup de hache pour fragiliser la vitre et passait au suivant. Bientôt, sous le poids de l’eau, le verre se fendilla et du liquide commença à couler vers l’intérieur.
Cyrille jeta un dernier regard à son œuvre et remonta l’escalier en courant. Il allait remonter dans l’appareil d’Atlaïs quand il entendit un cri dans son dos.
- Mais qu’est-ce que tu fais là ? Qu’est-ce qui se passe ? demanda Laurent.
- Je n’ai pas le temps de t’expliquer. Sache juste que tu avais raison : l’Atlantide n’a pas entièrement disparue. Mais il faut qu’on y aille ! Maintenant !
- Attends tu ne peux pas me lâcher une bombe comme ça et ne pas m’en dire plus. Prends au moins une minute pour me dire…
Il y eut une détonation et l’archéologue bascula en avant, l’air incrédule, une fleur rouge s’épanouissait déjà sur sa poitrine. Derrière lui se tenait Emma, un pistolet encore fumant à la main.
- Il m’énervait celui-là de toute façon. Mais toi ! Tu es bien coriace mon ami ! Je ne sais pas comment tu as fait pour échapper à Ataka…
Pendant que la jeune femme parlait, Cyrille recula lentement vers le bord du bassin. S’il arrivait à atteindre le petit sous-marin, il était sauvé.
Ses mollets heurtèrent le bord et il tomba à la renverse.
- Décidemment, tu aimes te retrouver à l’eau, se moqua Emma.
Soudain, une pierre l’atteignit au front : Despina venait au secours de Cyrille avec les seules armes qu’elle avait.
Le scientifique profita de la surprise de son ennemie pour regagner son embarcation. Il y grimpa et ferma le cockpit. Il était à l’abri maintenant et plus rien ne pouvait l’atteindre.
Son cœur se serra à la vue du corps de Laurent sur la berge. Son ami avait été si près du but…
Et Despina, Ataka et les autres êtres qui avaient souffert des expériences du Professeur Edeline et de sa nièce…
Il restait une seule chose à faire : libérer tous les cobayes. Atlaïs avait expliqué à Cyrille que les bassins étaient autrefois reliés à l’océan par un tunnel mais que celui-ci avait été condamné.
Grâce aux explosifs qu’avait cachés le dauphin lors des manœuvres, le mur fut détruit créant un passage dans lequel le sous-marin du scientifique s’engagea, suivit de Despina et tous les autres.
Quand il émergea à la surface de l’océan, il constata que l’île était en proie aux flammes et il y eut plusieurs violentes explosions. Les dernières volontés d’Atlaïs étaient respectées : personne ne saurait ce qui s’était déroulé ici !
Cyrille prit la direction du Nord pour rejoindre l’archipel des Açores. Qu’allait-il dire au sujet de ce qui était arrivé au reste de l’équipe ? Il n’en savait rien… Mais ce dont il était sûr, c’est qu’il ne dirait rien de ce qu’il avait découvert.
Atlaïs et sa cité perdue reposeraient en paix au fond de la mer.
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